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À quoi sert une approche interculturelle dans le déploiement des projets de transformation Lean ? Cas d’une transformation réussie

À quoi sert une approche interculturelle

Préambule

 

Penser l’approche interculturelle dans un projet de changement est une initiative plutôt rare. Anticiper le choc culturel, préparer les équipes à travailler différemment : ce sont en général les missions des consultants et formateurs interculturels dans le contexte de développement international.

Pourtant, quand Peter Drucker, économiste américain, nous met en garde « Culture eats strategy for breakfast » (« La culture dévore la stratégie au petit déjeuner »), il parle de la culture au sens large. La culture est un système de sens qui imprègne l’organisation. Elle est le moteur des actions de ses parties prenantes. En soi, le changement est porteur d’un sens nouveau que parfois les acteurs concernés ont du mal à décrypter.

Le cas que nous souhaitons vous présenter nous permettra de nous interroger sur la pertinence d’une approche interculturelle dans les projets de transformations organisationnelles Lean.
 

Contexte de changement : un service qui vit « bien » sur ses acquis

 

Marc est Directeur des ventes, responsable d’une régie publicitaire interne au sein d’un grand groupe de presse. Sa position dans l’entreprise est solide, de surcroît validée par plus de 30 ans d’expérience. Son unité commerciale vend aux entreprises des espaces publicitaires dans différents titres du groupe, ainsi que des services associés : flyers, inserts, etc. Il manage 25 commerciaux, qui génèrent en moyenne 80 M€ par an.
 
Cependant, le marché de la publicité papier est de plus en plus difficile. Les concurrents numériques grappillent des parts de marché. La situation de la société s’affaiblit et, dès son arrivée, le nouveau PDG lance une transformation de l’unité commerciale afin d’accroître la productivité et de gagner en souplesse.
 
La décision du PDG laisse Marc sceptique : son département est prospère, le chiffre d’affaires est au rendez-vous. Si les objectifs commerciaux sont atteints, pourquoi changer ?
 
L’argument de la direction portera surtout sur la rentabilité du service. Les chefs de publicité se sont spécialisés dans la vente de petites espaces, vente souvent bradée et générant beaucoup de trafic au niveau d’un service exécution débordé, qui doit faire face à un accroissement exponentiel des petites factures à traiter au jour le jour. De plus, le PDG pointe la faible marge générée par les commerciaux ainsi que les méthodes de vente inefficaces : l’équipe travaille sans faire appel aux outils numériques ni aux réseaux sociaux.

Approche Lean : la mise en oeuvre d’une solution pour rapidement rentabiliser le service s’avère difficile

 

Pour transformer l’unité commerciale, le PDG choisit l’approche Lean : maximiser la valeur client, en minimisant le gaspillage. Une consultante, Joanna, épaule Marc. Pour ce dernier, le COMEX définit les objectifs d’ici la fin de l’année : économiser 1 million d’euros ; et stimuler les ventes grâce à l’amélioration des processus, à une meilleure utilisation du capital humain, et à une formation aux compétences commerciales.
 
Joanna rencontre Marc pour un premier brief. Elle sent une certaine réticence de la part du directeur, qui considère que son service fonctionne bien. Il ne discerne pas l’utilité des outils désincarnés négligeant la spécificité de ses clients et produits.
 
LEAN MANAGEMENT
Excellence operationnelle

Le contrat tacite de la société reposant sur la valorisation d’une forte capacité relationnelle et de l’autonomie… et leurs conséquences pour le business

 

Tout de suite, Joanna voit que les équipes de ventes fonctionnent avec très peu d’outils, s’appuyant sur la seule relation personnelle établie au fil des ans. Les commerciaux préfèrent indiquer aux clients le catalogue papier. Ils négligent le CRM, principalement parce que l’outil n’a jamais été configuré et qu’il contient des listes de clients achetées il y a plusieurs années. L’historique des interactions est stocké dans la tête des commerciaux. En conséquence, aucune image claire de l’état des ventes ni des prospects n’est disponible à un moment donné – les rapports sont communiqués lors de réunions mensuelles avec Marc.
 
Joanna remarque un manque de collaboration entre les membres de l’équipe commerciale – ils ne discutent pas des meilleures techniques de vente ni n’exploitent les opportunités de ventes croisées. Ce manque de collaboration s’étend au-delà de cette entité : à plusieurs reprises, la directrice e-commerce et marketing a proposé d’aider mais Marc se juge capable de gérer l’activité avec les moyens du bord.
 
Pour le business, les conséquences sont désastreuses : il existe une importante différence de rentabilité entre les zones, certaines appliquant des marges faibles ou même vendant au prix d’achat, tandis que d’autres appliquent une marge en moyenne de 13%. La raison : les commerciaux sont incités au volume des ventes, et pas à la marge commerciale. Dans plus de 50% des cas, les équipes ont recours à des remises.
 
Le journal des ventes des 5 dernières années montre que 80% des clients génèrent seulement 20% des revenus. De plus, ces 80% bénéficient de services identiques aux autres tout en consommant plus de 70% du temps des commerciaux.
 
Face à la résistance de son directeur commercial, le PDG veut forcer l’adoption de l’outil CRM. Marc se bat comme un lion contre ces changements, qu’il pressent perturbateurs pour ses équipes. Il craint de perdre la confiance de ses clients, et surtout de ne pas atteindre ses objectifs. Il est soutenu par les plus anciens de ses commerciaux : ceux qui génèrent le chiffre d’affaires sans pour autant recourir au CRM ou aux outils digitaux.
 

Analyse des freins et des leviers culturels

 

Le fonctionnement installé depuis longtemps rend la transformation difficile. Premièrement, parce que les commerciaux ne voient pas en quoi leur fonctionnement actuel est dommageable pour la rentabilité de la société : le chiffres d’affaires en croissance chaque année, ne prouve-t-il pas leur efficacité ?
 
Deuxièmement, la société repose sur un relationnel fort. Ainsi, les processus et les outils sont secondaires dans un contexte où l’autonomie et la débrouillardise ont une valeur forte. Dans la résolution des problèmes, ce rapport contextuel à la règle permet à la personne de faire appel à son libre arbitre. En outre, il se révèle décisif dans la manière d’appréhender les rôles au sein de la société. Philippe d’Iribarnne décrit ce trait culturel français dans son ouvrage « La logique de l’honneur » en faisant référence au caractère « missionnaire » du travailleur français réticent au contrôle trop pointu ou d’explicitation de sa fonction. Selon d’Iribarne « Contrairement au manager américain, le Français ne fixe pas d’objectifs trop précis à ses collaborateurs, car cela serait ressenti comme une remise en cause de la connaissance qu’ils ont de leur métier. Il laisse beaucoup d’autonomie dans l’organisation, ce qui peut aussi engendrer un risque d’arbitraire. Un subordonné peut être jugé sur une notion aussi floue que celle de « bien faire son métier ». Cette notion de management « implicite », où les feuilles de route ne sont pas toujours appréciées, nous la retrouvons dans le cas de Marc et de ses équipes. Comme l’a remarqué Joanna, ils partagent peu sur les techniques de ventes en faisant référence à un art très personnel de gérer la relation commerciale et l’acte de vente.
 
Le recours au CRM pourrait menacer les positions au sein du département : les commerciaux pourraient-ils être moins nécessaires, ou même remplaçables ? Voilà qui nous rappelle étrangement cette définition du pouvoir au sein des organisations, formulée par Michel Crozier comme la capacité à « maîtriser l’incertitude de l’autre » : plus Marc garde des zones d’ombre sans soumettre ce qu’il sait aux outils le rendant transparent, plus sa position est stable. Si cette crainte peut s’avérer irrationnelle, elle constitue néanmoins un frein important dans la mise en œuvre de l’outil.

Enfin, comment accepter que ce qui a été jusqu’alors valorisé – le chiffre de ventes au prix de marges faibles – puisse être perçu comme une faute ?
 
Marc et ses équipes vont donc tout faire pour ne pas perdre leur statut des « stars du chiffre » dans l’entreprise.

L’approche interculturelle dans la mise en œuvre de la méthode Lean

 

Afin de surmonter les résistances, Joanna propose un plan d’action prenant en compte ces blocages culturels. Le premier enjeu est de préserver le statut de Marc, qui est apprécié par la direction et ses équipes. Le PDG lui confie la gestion du projet, en se fondant sur son expertise et en lui laissant l’autonomie suffisante pour gérer la relation avec Joanna. Il est placé au cœur du dispositif. Ses conseils et son expertise sont reconnus.
 
Par ailleurs, Joanna doit faire preuve de pédagogie en essayant de convaincre les équipes que l’outil n’est qu’une aide dans la fluidité de cette relation commerciale, et qu’en aucun cas elle la remplace. Ainsi la faible marge est-elle également mise sur le compte d’un défaut organisationnel et non personnel, ce qui permet de déplacer la responsabilité de la faute sur une organisation systémique et non pas sur les commerciaux.
 
Une fois le terrain préparé, une société externe configure d’abord un CRM pour les besoins du secteur et en appui des conseils de Marc. Joanna présente une solution Excel, dans laquelle les responsables des ventes peuvent directement saisir les données. L’outil génère des statistiques quotidiennes et, une fois par semaine, le tableau de bord des indicateurs de performance est partagé avec le PDG. Les équipes commerciales commencent à s’approprier le projet.
 
Avec le soutien de deux équipes (l’une marketing, l’autre commerciale), qui désormais se connaissent mieux, Joanna procède à une segmentation des clients, qu’ils soient nouveaux ou historiques. Pour chaque segment, il met en place une offre de services. En parallèle, il entame le travail avec l’équipe d’e-commerce interne et un fournisseur externe, en concevant puis en installant un outil de production de devis en ligne, destiné aux plus petits clients et à leurs requêtes.
 
Cette initiative permet aux commerciaux et à l’équipe support de se concentrer sur les clients les plus rentables, et de leur proposer des actions personnalisées.

Les responsables des ventes sont équipés de tablettes connectées à Internet. Ils peuvent afficher le catalogue, personnaliser les plans médias ou, lors de réunions avec les clients, proposer directement des devis.

Finalement, après cette période de transition, les nouvelles primes sont décidées pour les commerciaux. Ces derniers ont dorénavant des objectifs de vente plus ambitieux, mais aussi des objectifs de marge, individuels et collectifs, qui déclenchent une prime s’ils sont atteints.


Afin de soutenir les nouveaux processus de gestion de la relation client, Joanna met en place un programme de formation aux techniques de vente.
 

Épilogue

 

Dans ce cas de figure, la prise en compte d’un contexte organisationnel et culturel a servi d’accélérateur pour le projet. L’approche interculturelle consiste à reconnaître la puissance du facteur culturel dans tout projet de changement, et son rôle dans la tendance homéostatique des organisations.

Est-ce que ce projet pourrait fonctionner sans cette prise de conscience ? Peut-être… La position hiérarchique du PDG aurait pu suffire à forcer un changement auquel ni Marc ni ses équipes ne croyaient. Mais le prix à payer serait certainement le temps plus long de mise en œuvre et, surtout, une forte démotivation des commerciaux – parfois même du sabotage. Il faut savoir que la durabilité de ce type de projet est garantie par le niveau d’adhésion des équipes.

Ewa GALLOU   Ewa GALLOU,
Consultante, formatrice et enseignante en management interculturel
     
Anna DYNGOSZ   Anna DYNGOSZ,
Consultante, spécialiste en lean management
 


Si dans vos projets de changement et de transformation, vous rencontrez des difficultés causées par les differences interculturelles de vos équipes
 
 
 
 
 
 
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